Apprécié et recherché depuis des millénaires pour ses propriétés uniques, l’or est aujourd’hui considéré à la fois comme une matière première et comme un actif financier. On parle alors d’or d’investissement. À ce titre, son prix peut être influencé à la hausse ou à la baisse par de nombreux facteurs ; certains sont endogènes (propres à l’or lui-même), mais la plupart sont exogènes, c’est-à-dire liés à des évènements ou des causes totalement extérieures.

Le prix de l’once d’or dépend d’une production très variable

L’or est avant tout un métal dont la production est issue de l’exploitation minière. Par conséquent, indépendamment de sa nature précieuse, il n’est pas très différent des autres métaux et sa valeur sur le marché va donc être très logiquement influencée par la quantité proposée. 

Des gisements de moins en moins accessibles

Ainsi l’offre se révèle variable suivant les années, car on ne trouve pas de nouveaux gisements de manière régulière et l’exploitation des gisements existants est de plus en plus compliquée. En effet, l’or est en quantité finie sur Terre et l’essentiel de l’or facilement accessible a déjà été récolté par les peuples anciens à des époques où, de toute façon, il ne leur aurait pas été techniquement possible d’aller le chercher très loin en profondeur.

D’un point de vue économique, cette rareté se traduit naturellement par un prix élevé, lequel va d’ailleurs varier en fonction de l’épuisement inévitable des exploitations, ou au contraire de la découverte de nouveaux gisements.

Le cercle vicieux de l’endettement des producteurs

De manière plus subtile, le cours de l’or physique va également fluctuer en fonction de la situation économique des producteurs. Ceux-ci ont pu en effet s’endetter lourdement à des moments où la valeur de l’or était au plus haut et rendait rentable l’exploitation de gisements nécessitant par exemple des équipements plus performants permettant de creuser plus profondément. Mais sortir plus d’or des entrailles de la Terre a comme inconvénient de faire grossir l’offre de métal disponible… et donc de faire baisser les prix. Les producteurs se voient donc contraints de produire davantage d’or pour rembourser leurs lourds investissements, à plus forte raison si le cours de l’or devient plus bas que lorsqu’ils se sont endettés. Cependant, là encore, plus de production signifie plus d’offre et donc des prix attirés vers le bas.

Seule solution pour faire remonter le prix de l’or : il faut que la demande augmente elle aussi.

Une demande en or qui fluctue cycliquement mais augmente globalement

On l’a vu, la production de métal précieux s’avère de plus en plus difficile à mesure qu’on assèche les gisements les plus accessibles. De son côté, la demande ne cesse de progresser, sous l’effet d’évènements cycliques, de mouvements de fond menés par les premières institutions financières mondiales, mais aussi des nouvelles technologies en plein essor. 

La saison des mariages fait exploser les ventes d’or en Asie

Ainsi, chaque automne marque le début de la saison des mariages en Asie, principalement en Chine et en Inde, deux pays qui regroupent à eux seuls plus d’un tiers des humains vivant sur Terre. Dans ces pays, la coutume veut qu’on offre de l’or à l’occasion des mariages. Beaucoup d’or, plusieurs centaines de tonnes chaque année, sous forme de pièces et de bijoux notamment. Le métal précieux est en effet censé apporter fertilité et prospérité aux nouveaux ménages, et avec 10 millions de mariages célébrés chaque année rien qu’en Inde, on comprend que la demande soit énorme et puisse faire varier les cours de l’or de manière significative. Au final, toutes raisons confondues (car l’or est également un outil d’épargne très prisé), l’Inde et la Chine achètent ainsi près de 2000 tonnes d’or chaque année, soit la moitié de la demande mondiale. La moindre fluctuation de cette demande a donc des répercussions immédiates sur le cours de l’or.

Les banques centrales accroissent leurs réserves d’or

Mais la demande d’or n’est pas simplement liée à sa symbolique ancestrale, elle est également tout ce qu’il y a de plus rationnelle et financière. Ainsi, quasiment toutes les banques centrales du monde, à commencer par la Réserve Fédérale Américaine et la Banque Centrale Européenne qui sont les deux plus importantes, possèdent des réserves d’or considérables, car elles constituent une masse d’actifs sécurisés et totalement liquides pouvant servir de garantie à long terme face à d’éventuelles catastrophes économiques qui pourraient rendre le système de devises et de marchés brusquement inopérant. Aujourd’hui, ces réserves représentent environ 34 000 tonnes d’or, principalement sous forme de lingots, et elles continuent à grossir de quelque 650 tonnes chaque année. Là encore, cette demande peut fluctuer d’une année sur l’autre, et influer sensiblement sur le cours de l’or.

réserves d'or banques centrales
Source : Metals Focus, Refinitiv GFMS, World Gold Council

L’or a un rôle essentiel dans les nouvelles industries

Enfin, l’or est aussi un métal aux propriétés physico-chimiques uniques qui le rendent indispensable dans un très grand nombre d’industries de pointe. Qu’il s’agisse d’électronique où il est plébiscité pour son excellente conductivité électrique, d’aérospatial où sa fiabilité inaltérable constitue un atout, de technologies environnementales dans lesquelles il est essentiel aux processus d’équilibre thermique, ou encore du domaine médical qui apprécie sa neutralité chimique, l’or pur est désormais présent dans la plupart des secteurs d’activité modernes (et a fortiori d’avenir). À cet égard, chaque variation de production industrielle se traduit automatiquement par une variation similaire de la demande en métal précieux, et donc du cours de l’or.

L’influence des marchés sur le cours de l’or

Du fait de ses spécificités, et en particulier de son absence de rendement, l’or n’est pas un actif comme les autres sur les marchés financiers. D’ailleurs il n’est même plus coté à la Bourse de Paris depuis 2004. Néanmoins, les mouvements sur ces mêmes marchés peuvent orienter très fortement les cours de l’or en amenant les investisseurs à acheter ou vendre du métal précieux en fonction de leur intérêt à court terme.

L’or est une valeur refuge face aux risques de marché

Traditionnellement, investir dans l’or physique a toujours constitué une valeur refuge à l’égard des marchés financiers classiques. En effet, alors que la valeur des actifs en bourse, ou même des devises, peut s’effondrer en cas de crise économique majeure, celle de l’or ne sera que peu affectée et le métal jaune conservera toujours plus ou moins le même « pouvoir d’achat ». Mieux encore, même si l’or n’est pas censé générer un rendement, son cours peut fortement s’apprécier lorsque les marchés boursiers subissent une forte baisse. Ainsi, alors que l’économie mondiale se voyait sinistrée par la crise du coronavirus entre février et août 2020, le cours de l’or connaissait quant à lui une hausse record de 20%. Le même phénomène s’était déjà produit en 2008, lors de la crise des subprimes, ainsi qu’en 2012 à l’occasion de la crise des dettes souveraines dans la zone euro.

L’or dépend de la valeur du dollar

Le cours du dollar va lui aussi influer directement sur le cours de l’or. Tout simplement parce que le prix de l’once d’or est généralement exprimé en devise américaine dans les échanges internationaux. Concrètement, donner un prix en dollars à l’once d’or revient à calculer combien de dollars pourraient être échangés contre cette quantité de métal précieux. Si la valeur du dollar baisse, alors il en faudra davantage pour acheter une once d’or, et le prix affiché de cette dernière augmentera donc en conséquence. En clair, le cours de l’or évolue inversement à celui du dollar. Quant au prix de l’or dans les autres devises, il suivra peu ou prou le prix en dollar en fonction du taux de change.

Les taux d’intérêt réels conditionnent l’intérêt pour l’or d’investissement

Enfin, le taux d’intérêt des obligations d’État va également dicter le niveau de prix de l’once d’or, de manière plus indirecte certes, mais tout aussi efficace. En effet, le rendement de ces obligations est fixé par les banques centrales avec pour objectif d’être suffisamment attractif pour susciter l’intérêt des investisseurs tout en restant modéré pour ne pas trop concurrencer non plus les marchés actions. Cet exercice d’équilibriste est en outre compliqué par l’inflation qui vient amputer la rentabilité des obligations, et les investisseurs se basent alors sur ce qu’on appelle les « taux réels », c’est-à-dire la rentabilité brute des titres dont on déduit l’inflation. Lorsque ces taux réels augmentent, les investisseurs souhaitant des produits « sécurisés » vont généralement se désengager des valeurs refuge comme l’or (qui ne génère classiquement aucun rendement) pour se reporter sur les obligations d’Etat et les autres classes d’actifs dont le rendement reste lié aux taux d’intérêts. La demande en or baissant, le cours du métal va alors lui aussi s’orienter à la baisse. À noter que le taux d’intérêt le plus important est celui fixé par la Réserve fédérale américaine, véritable arbitre clé des marchés mondiaux.

D’autres causes de variations du cours de l’or

En cas de crise majeure à l’échelle mondiale, l’histoire a montré que le cours de l’or a généralement tendance à grimper car les investisseurs achètent le métal pour se protéger des incertitudes. Les particuliers ne sont pas en reste, mais pour des raisons évidentes de coût et de liquidité, ils vont privilégier les pièces d’or aux lingots. On a dit plus haut que la pandémie mondiale a été l’occasion d’une forte augmentation du cours de l’or, mais c’est aussi parce que sur le long terme l’or reste encore le meilleur support tangible pour sécuriser la valeur d’un capital, indépendamment des crises et quelle que soit leur ampleur. Et si les banques centrales accroissent sans cesse leurs réserves d’or, c’est en effet pour profiter de sa qualité de valeur refuge, mais aussi peut-être un peu parce que, sur les 50 dernières années, le cours de l’or a connu une progression annuelle moyenne de 10%.

Enfin, on ne saurait parler des facteurs influençant le cours de l’or sans évoquer l’or papier. Il s’agit de produits financiers qui permettent de spéculer sur les variations du cours du métal précieux sans jamais acheter ou vendre la moindre pièce d’or. Ces instruments sont bien basés sur de l’or physique mais dans des quantités considérablement plus faibles que celles qui sont échangées virtuellement sur le papier. Le problème c’est que ces titres agissent comme des créances « sécurisées » par la même quantité d’or pour tous ! Ainsi, à l’instar de la monnaie qui est créée par l’octroi de crédit, l’or papier est créé par la promesse de contrepartie d’une dette. Et cet or virtuel vient s’ajouter à l’or physique, gonflant artificiellement l’offre disponible, ce qui a pour effet de maintenir le cours de l’or au plus bas.


Bruno GONZALVEZ

Auteur et consultant depuis plus de vingt ans dans le domaine de la communication stratégique, il a plusieurs fois travaillé pour le compte d'entreprises financières dont il décrypte aujourd'hui les coulisses, tout en vulgarisant les mécanismes économiques de base à l'intention du plus grand nombre.